Publié le : 28 septembre 20204 mins de lecture

Si les chercheurs de l’Inra défendent des systèmes fortement herbager pour endiguer les marées vertes en baie de Lannion, ils pointent aussi le manque d’implication des citoyens et des filières amont-aval.
Le bilan du programme de recherche Acassya(1), initié en 2008, a été présenté à Pleumeur-Bodou en Côtes d’Armor sur deux jours de restitution, le premier en salle, le second sur une ferme pilote les 13 et 14 juin. Conduits par l’Inra, les travaux visaient à échafauder un système de production et de cultures compatible avec l’enjeu des algues vertes sur les bassins versants de la Lieue de Grève, près de Lannion.  Afin de réduire les pertes de nitrates, les chercheurs ciblent la solution « herbe » sur un territoire où « les systèmes bovins sont très dominants et favorables à l’herbe ».

Deux indicateurs sont proposés,  à savoir le nombre d’UGB par hectare d’herbe ainsi que la quantité d’azote par hectare de SAU en entrée, qui combine azote minéral avec azote aliments (0,75 ou 0,65) et azote organique (export – import). Si les seuils suivants sont annoncés: 1,40 UGB/ha de cultures pérennes et 100 kg d’azote/ha de SAU, leur application n’est pas à généraliser. « Attention, remarque le chercheur Laurent Ruiz, ces chiffres dépendent du type de climat et de sol. Cela n’est pas applicable partout car très liés aux conditions locales ».

Grâce à un panel de dix fermes pilotes, parmi lesquelles 9 producteurs de lait et un producteur de porc, les orientations proposées sont jaugées « grandeur nature ». « Avec les fermes pilotes, on va dans le bon sens. Certains y sont déjà », assure le chercheur.

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L’implication de tous

Mais au delà des aspects importants que sont les critères techniques, l’autre bilan du programme Acassya n’est autre qu’un constat global sur la filière et les citoyens. « Si l’agriculture doit prendre un virage, mettre en relation des chercheurs et des agriculteurs ne suffit pas », estime Laurent Ruiz, « C’est toute la filière qu’il faut impliquer : l’amont et l’aval ainsi que les consommateurs ». Pour les chercheurs, les objectifs de qualité de l’eau, à 10 mg/litre de  nitrates, impliquent une transition agro-écologique des systèmes de production. A Pleumeur-Bodou, un constat, non pas scientifique, a été délivré. Car ni les filières (autre que les agriculteurs), ni les consommateurs ne sont interpelés dans cette affaire. « Il faut que la société statue sur les enjeux des marées vertes et donne les bons messages ». Autrement dit accompagne la démarche et compense la perte de valeur ajoutée. Le poids du changement de système ne peut être supporté par les seuls agriculteurs comme le rappelle une agricultrice d’une des fermes pilotes. « Les fermes pilotes ne sont pas subventionnées. Si nous perdons, cela retombe sur nous, non sur vous », témoigne Edwige Kerboriou de Plouzélambre, qui réclame la reconnaissance des avancées, la sécurisation de la démarche et la levée des contraintes réglementaires. « Nous avons la crainte qu’en faisant ce que l’on fait volontairement, cela ne devienne une contrainte réglementaire pour d’autres BV en Bretagne ».

(1) « Accompagner l’évolution agro-écologique des systèmes d’élevage dans les bassins versants côtiers ».

Une enquête de la Draaf valide l’amélioration des pratiques de fertilisation en Bretagne

Dans une étude parue en juin 2013, la Draaf Bretagne, enquête à l’appui, confirme  la réduction des excédents azotés en Bretagne avec une balance azotée globale en baisse à 26 kg d’azote par hectare en 2011 contre 38 kg en 2004.  L’explication principale est « le développement de la résorption des effluents d’origine organique ». Généralisation de l’alimentation biphase des porcs, traitement des lisiers dans les stations, export ou échange, 14% de la quantité d’azote est ainsi réduite. Même chose pour le phosphore, avec une baisse de la balance globale de 25 kg/ha en 2004 à 12 kg en 2011.